Avril
1995
Matha Griffits s’est consacré pendant presque 60 ans à sa communauté, avec la constance et le dynamise qu’on lui connaît. Le rôle irremplaçable qu’elle a joué pendant 30 ans comme travailleuse sociale bénévole au Negro Community Center compte parmi ses succès les plus importants. Martha Griffiths est née à Manchester, en Jamaïque le 29 mai 1916. Elle est arrivée à Montréal à l’âge de 12 ans et y a fait ses études secondaires, après lesquelles elle a étudié le commerce et la dactylographie. Mme Griffiths a été membre du Coloured Women's Club pendant presque 50 ans. Ce club social a été fondé au début du 20e siècle par une poignée de femmes noires dans la Petite-Bourgogne. Elles souhaitaient pouvoir tenir leurs propres activités socioculturelles puisqu’à cette époque, les Afro-canadiens étaient exclus des clubs en vogue. Les membres du Coloured Women's Club organisaient à tour de rôle des rassemblements où les gens pouvaient venir danser, s’amuser et passer une agréable soirée. Les membres du club aidaient aussi les familles défavorisées ou les malades en offrant du soutien matériel, financier ou moral. Martha Griffiths était membre active du club ; elle occupait plusieurs fonctions stratégiques comme celles de secrétaire, trésorière et coordinatrice. De plus, elle ne limitait pas ses activités au Coloured Women's Club, puisqu’elle a fait également partie du conseil d’administration de l’Église Union United, la plus ancienne congrégation noire où elle s’occupait de la gestion du bâtiment, des campagnes de financement et du recrutement de membres avec l’enthousiasme et la dévotion qu’on lui connaissait. Elle s’est fait connaître pour son énergie appréciée de tous et pour le temps qu’elle consacrait au Negro Community Center ainsi que pour la tendresse qu’elle offrait aux enfants qui fréquentaient le centre. Chaque jour, elle accueillait une centaine d’entre eux pour le repas du midi, et en après-midi, elle supervisait un groupe d’enfants jusqu’à 17h pendant que leurs parents étaient au travail. En plus du temps passé avec les enfants, Martha Grifiths était responsable de plusieurs activités, dont l’école du samedi, la cafétéria, l’éducation physique et les camps d’été. Mme Griffiths a travaillé avec la communauté de la Petite-Bourgogne pendant plus de la moitié de sa vie, sans jamais se plaindre ou attendre quelque chose en retour. Elle est connue pour sa gentillesse et sa chaleur ainsi que pour son travail accompli. Et bien qu’elle ait pris sa retraite du Negro Community Center in 1984, elle est toujours impliquée régulièrement à 77 ans dans la planification des activités.
Mars
1995
Née à Haïti, « la première république noire », Maryse Alcindor a toujours travaillé à faire respecter les droits de la personne sans jamais faire de compromis. Elle croit fermement que la discrimination sous toutes ses formes ne doit pas être tolérée dans une société démocratique. Tout d’abord professeure, puis avocate, elle est maintenant directrice de l’éducation à la Commission des droits de la personne et de la jeunesse du Québec et continue plus que jamais à soulever des questions de droit humain et de susciter l’admiration de tous ceux qui l’entourent. Maryse Alcindor a immigré au Québec en 1965. Un an plus tard, elle obtient son diplôme en enseignement de l’Institut pédagogique de la congrégation Notre-Dame. Au cours de la même année, elle reçoit un baccalauréat en pédagogie de l’Université de Montréal. En 1967, elle commence à enseigner l’histoire et le français dans plusieurs écoles : Saint-Donat, Édouard-Montpetit et Marguerite-de-Lajemmerais. Afin d’étancher sa soif de connaissance, elle a poursuivi ses études et obtenu son baccalauréat et une maîtrise en arts à l’UQAM en 1978. L’année précédente, elle a réorienté sa carrière en enseignement et a entrepris des études en droit à l’Université de Montréal d’où elle obtient son diplôme en 1980. En septembre 1980, Maryse Alcindor est professeure d’histoire internationale et d’économie à l’École secondaire Henri-Bourassa lorsqu’elle est confrontée à des tensions raciales qui secouent l’école. Le problème reçoit une couverture médiatique pendant quelques mois avant que des affrontements violents surviennent entre des groupes d’étudiants. Afin d’encourager un dialogue constructif, Maryse Alcindor présente le projet Haïti-Québec, une activité qui vise à rapprocher les jeunes par le biais de séances hebdomadaires dans lesquelles ils partagent leurs problèmes, leurs peurs et leurs rêves. Les conversations sont parfois très animées, mais chacun devait respecter l’opinion de l’autre. L’apprentissage de la démocratie, l’acceptation de la différence et la promotion de l’égalité dans la dignité étaient les graines plantées dans ces jeunes. Le dévouement exceptionnel dont Maryse Alcindor a fait preuve dans tout ce qu’elle a accompli a été reconnu en juin 1981, lorsque les étudiants de l’école Henri-Bourassa l’ont élue « professeur de l’année ». Quelques mois plus tard, c’est auprès des étudiants de l’École secondaire Marie-Anne que Maryse va offrir son dévouement et partager ses convictions. Dans cette école, qui propose des cours spéciaux aux décrocheurs, elle fait la connaissance d’une clientèle mixte aux besoins bien différents de ceux auxquels les structures traditionnelles répondent habituellement. Ainsi, avec ses collègues, elle ouvre de nouveaux sentiers auxquels elle se consacre corps et âme pendant 4 ans. En 1985, Maryse Alcindor cesse d’enseigner pour se joindre à la Commission des droits de la personne et de la jeunesse du Québec. Depuis, elle a participé à plusieurs enquêtes importantes, dont deux fortement médiatisées. La première traitait, parmi autre chose, des conditions de vie des patients de l’Hôpital Rivière-des-Prairies, une expérience qui l’a marquée profondément. Elle découvre « les effets d’une dérive pernicieuse qui justifie des violations de droits de la personne afin de protéger les plus vulnérables en raison de leur âge et leur handicap ». En 1987, après la mort d’Anthony Griffin, Maryse a représenté Commission des droits de la personne et de la jeunesse sur le Comité des minorités visibles. Les résultats de cette enquête publique publiés en 1988 ont secoué le Québec. Ils démontraient que le problème imprégnait la société québécoise, de ses hauts dirigeants jusqu’aux simples citoyens, qui affichaient des signes troublants d’intolérance dans l’acceptation des Québécois de toute origine. Le résultat indiquant clairement que la seule action possible à entreprendre en était une de justice, de paix et d’égalité. Au cours des quatre dernières années, Maryse Alcindor a été directrice de la Commission des droits de la personne du Québec. Elle s’est impliquée dans le travail communautaire. Elle a participé à des programmes d’intérêt public et des colloques, elle a agi à titre de modératrice dans des ateliers de sensibilisation, en contribuant de différentes façons à améliorer la compréhension et la tolérance entre les différents groupes ethniques. « Je ne veux pas simplement observer les changements. Je veux participer pleinement aux nouveaux défis sociaux et je crois qu’il existe une place spéciale et exceptionnelle pour chacun d’entre nous ». Sa force, sa détermination sereine, mais inébranlable vient de sa famille, famille qui fait maintenant son bonheur et sa fierté : son mari, son partenaire et son inspiration pour les aspects plus originaux de son action, ses filles, qui, au fil des jours, deviennent la réalisation concrète de ses rêves d’une jeunesse noire du Québec fière et libre, de véritables jeunes « néguèss Vanyan » - gardiens de la mémoire de luttes constantes du peuple haïtien. Mais le rêve se continue, et Maryse Alcindor continuera de le poursuivre, parfois seule, mais le plus souvent possible avec d’autres. Comment? Maryse Alcindor sourit : « Pourquoi restreindre l’imagination à l’intérieur des limites que nous connaissons ? Le meilleur n’est-il pas à venir ? »
Février
1995
La vie de Toussaint Louverture fut tumultueuse et son ascension d’esclave à gouverneur général est plus qu’extraordinaire. Il joua un rôle crucial dans l’abolition de l’esclavage dans l’île de Saint-Domingue et dans l’indépendance de cette région des Antilles.Toussaint Louverture est né en 1743 sur la plantation de Bréda, située à Haut-du-Cap sur l’île d’Hispaniola (Haïti). Il est le petit-fils de Gaou-Guinou, roi des Aradas, une nation africaine. Au cours de sa jeunesse, il s’occupe des animaux sur la plantation et apprend même les bases de la médecine vétérinaire. Il se démarque des autres jeunes par son intelligence, sa passion pour les livres et son amour de l’éducation.En 1789, il devient cocher, puis après avoir gagné la confiance du contremaître de la plantation, il est pris comme assistant par celui-ci. Sa ponctualité et son sérieux lui valent de gagner le respect de son entourage et même celui des colons blancs de la région. Personne ne voit en cet homme consciencieux et peu bavard le fier chef qui, après 40 ans d’esclavage, deviendrait maître du destin de Saint-Domingue. Au fil des jours la tension monte parmi les colons, les locaux et les esclaves insatisfaits. En 1791, la rébellion gronde et Toussaint Louverture joue un rôle de premier plan dans les préparatifs de la révolte des esclaves. Au printemps 1793, il joint l’armée espagnole où il est remarqué par des officiers qui lui enseignent l’art de la guerre. Rapidement, on lui confie le commandement d’une armée de 4000 soldats noirs qu’il mène à la victoire en de nombreuses occasions. Ses nombreux exploits lui valent d’être décoré de l’épée d’honneur, et d’être promu lieutenant général dans les armées du roi d’Espagne.En mai 1794, Louverture change d’allégeance après avoir réalisé qu’il ne recevrait jamais les honneurs qu’il mérite et que les conditions de vie de son peuple ne changeraient pas sous la gouverne de l’Espagne. Il n’avait jusqu’ici combattu que pour la libération des esclaves noirs et l’abolition définitive de l’esclavage. Il choisit de poursuivre sa quête sous le drapeau français et réussit contre toute attente à forcer l’Espagne à quitter l’alliance l’opposant à la France et à céder à ce pays la partie est de Saint-Domingue (l’île occupée par la France, l’Espagne et l’Angleterre. Louverture est un homme charismatique et un organisateur doué et les représentants français ne mettent que peu de temps à reconnaître ses talents. Il est promu général de brigade en 1795, général de division en 1796 et général des troupes françaises de Saint-Domingue en 1797. Partout où il passe, la paix revient : les colons blancs rentrent chez eux rassurés ; les fermiers et les anciens esclaves cultivent la terre. Les Noirs comme les Blancs chantent ses louanges, il est celui qui a restauré l’ordre et la prospérité.